• Derrière les oeuvres plastiques

    François Richaudeau s'est toujours intéressé aux structure sous-jacentes qui donnent sens à ce qui apparaît : Ainsi, par exemple les lignes en réseau qui vont de nœud de sens en nœud de sens lorsque l'œil suit le déroulé d'un texte. Autre exemple : Dans le processus cognitif Richaudeau s'oppose à la conception linéaire de la pensée cartésienne et privilégie une pensée complexe en réseau ou en rhizomes à l'instar d'Edgar Morin ou de Gilles Deleuze. Enfin, il retrouve ses intuitions dans un ouvrage, découvert par hasard, traitant de la combinatoire, écrit au XVII ème par le jésuite allemand Athanase Kircher (1).

      Une conférence, prononcée à l'Université Denis Diderot de Paris, montre que sa curiosité insatiable s'est aussi penchée sur les arts plastiques. Dans son intervention, il décrit les lignes de force cachées, qui structurent toute représentation plastique, comme la charpente soutient le toit.

    http://www.visiotice.fr/ARTEMIS/hermes/hermes/actes/ac0102/structplast_richaudeau.htm

    S'appuyant sur l'ouvrage de Charles Bouleau, « La géométrie secrète des peintres », il distingue trois formes de structures : rayonnante, en cercle, en quadrillage.

      Malheureusement, si l'application de telle structure à tel tableau semble assez pertinente, il ne nous dit pas quel sens particulier cette structure peut donner à la représentation plastique ; sauf dans un cas : celui du Mandala où la structure en cercles concentriques et en labyrinthe, dévoile le parcours de sagesse de celui qui l'élabore ou le contemple.

      D'autre part, il reste étrangement silencieux sur une structure sous-jacente à toute la peinture occidentale, de la Renaissance à l'Art Moderne, à savoir, la perspective. Cette dernière, qu'elle soit monofocale, multifocale ou courbe, est, selon ce que nous en dit brillamment l'historien d'art Daniel Arasse (2), une invention politique sous-tendant l'humanisme en art qui perdurera jusqu'au cubisme.

      C'est, en effet, entre 1420 et 1450, qu'à Florence, un certain Côme l'Ancien, pour des raisons politiques trop complexes à exposer ici, décide de créer une peinture « sobre, pleine de dignité et de tradition toscane », qui s'opposerait à la peinture gothique internationale, art de cour par excellence.

    Pour cela, il fait adopter un principe de construction du tableau, dans un cadre carré, où les lignes de fuite de la perspective dessinent l'architecture d'une place, où se tiennent des personnages et sur laquelle se fait l'Histoire : c'est la place urbaine où se manifeste le pouvoir de la res-publica.

      Nul doute que toute autre règle de composition du tableau, surtout à partir de l'âge classique, a une fonction idéologique plus ou moins précise. Même si, comme le souligne malicieusement François Richaudeau dans sa conférence, il peut exister plusieurs structures possibles pour un même tableau, donc plusieurs interprétations. Car, une image est, par nature polysémique ; surtout celles nées de l'imagination d'un artiste !

       Il reste, qu'avec ses lacunes - mais le temps imparti à un intervenant lors d'un séminaire est nécessairement limité - la réflexion de François Richaudeau ne manque pas, comme toujours, d'être extrêmement stimulante pour l'esprit.

     

    Alain Le Métayer.

     (1)   cf. François Richaudeau : « Façons de ... ». Editions La Gazette de Lurs. Pages 13 à 18.

    (2)   Daniel Arasse. « Histoire de peintures ». Folio Essais.